Le chiffre révélateur

(Recouvrement d'un scoop)

- Le chiffre parle. - Comment le faire taire ? - Par un entrefilet.

LE CHIFFRE 1 enfant sur trois est pauvre en Grande-Bretagne Une enquête commandée par le ministère britannique des Affaires sociales, publiée vendredi, démontre que la pauvreté gagne un peu plus de terrain au Royaume-Uni. Près de 14 millions de ménages vivent sous le seuil de pauvreté de 114 £ (900 francs) par semaine, soit la moitié du revenu moyen. Ils n'étaient que 5 millions en 1979. En un an, 400 000 nouveaux Britanniques ont rejoint cette catégorie. Le phénomène touche 32 % des enfants (4,1 millions, contre 1,4 millions en 1979). En 1992, les 10 % de ménages les plus défavorisées (moins de 520 francs par semaine) ont vu leur revenu net décliner de 17 %, tandis que les 10 % les plus riches ont enregistré un gain de 62 %. du samedi 16 et dimanche 17 juillet 1994

Quand nous proposons que la jeunesse se trouve ou s'invente à partir « d'un présent qui ait un avenir », cela nous engage en tout premier lieu à voir quel avenir nous est préparé. Cette statistique nous dévoile crûment un futur effroyable : un enfant sur trois est pauvre en Grande-Bretagne. On pourrait bien sûr se rassurer sans trop chercher plus loin : « Oui, mais en France (Allemagne, etc.)... »

Oui, mais en France ?

Première constatation. Cette statistique est en fait un véritable scoop qui aurait dû mobiliser toutes les oppositions contre les méfaits de l'ultra-libéralisme. Passer de cinq millions de ménages vivant sous le seuil de pauvreté en 1979 (900 francs par semaine) à 14 millions en 1994, mérite mieux qu'un entrefilet.

Deuxième constatation. L'ultra-libéralisme de Thatcher se révèle, à travers cette statistique, comme une machine monstrueuse de destruction de l'avenir : déjà, au présent, un enfant sur trois est pauvre en Grande-Bretagne, et demain ???

Troisième constatation. Ne devons-nous pas nous demander si le CIP n'était pas une machine perfectionnée issue du thatchérisme, pour programmer rationnellement la mise au pas des futurs pauvres en France ? Et à la suite de l'échec de cette tentative, ne faut-il pas maintenant s'appliquer à voir quelle sorte de « machination » se met en place pour neutraliser toute résistance possible de la part des générations montantes ?

Quatrième constatation. Et ce n'est pas le moins angoissant des constats. Comment le peuple britannique, sa jeunesse, en sont-ils arrivés à laisser réduire à cet état de misère une partie importante de la population ? Pourquoi l'opposition a-t-elle été si faible ? Pourquoi tant d'indifférence devant les malheurs qui frappent chaque jour le pays ?

Il nous reste à nous demander, si nous ne voulons pas nous retrouver dans un très bref délai dans cette situation ou pire, comment engager un combat qui nous ouvrira un autre avenir que celui que cette enquête britannique nous révèle.

N'oublions pas l'exhortation de Serge DANEY : « L'information n'est pas un dû, mais une pratique ».