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Numéro 30 WEB
Les conditions du lisible 10 : L’être en devenir, et le devenir de l’être (Entre l’erreur et la méprise)
photo d’Alexandre Chemla
Par Marc’O |

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En ce qui me concerne, ces perspectives ont changé profondément ma vision du monde, en premier lieu, l’idée que je me fais de moi-même. Je me suis peu à peu convaincu que, c’est moins la différence entre être et devenir qu’il me convenait d’approfondir, il mène droit sur un chemin truffé d’embûches, générateur d’erreurs, je me suis persuadé qu’il est bien plus excitant ou, mieux, existant, de découvrir voile après voile les différences qu’implique de soi le terme être, selon qu’on lui attribue les propriétés d’un substantif ou les règles qui s’appliquent au verbe.

Le verbe être quand il qualifie le substantif être n’a guère d’intérêt. Dans le cadre des connaissances tout court, il se borne à reconnaître que ceci et cela sont dignes d’être placés dans les rubriques diverses du savoir. Par contre, si dans mon esprit le verbe être porte en lui un devenir, je suis ce qu’à chaque pas je réussis à trouver dans cet espace inconnu où je me débats contre mes habitudes, un combat tel qu’il me faut inventer un néologisme tordu complexitude pour exprimer cette torsion de mon esprit qui me pousse à jurer de mes grands Dieux que le savoir doit avoir de la saveur, à défaut de quoi les connaissances n’ont qu’à aller se faire foutre ailleurs.

Là tout s’embrouille à nouveau.

Reste, ce bouillonnement d’idées entre deux dérapages dans une remontée très raide d’une montagne abrupte que je livre à votre perspicacité.

Puis et en bien gras, cette interrogation

The french traduction of
“To be or not to be ?”

That is the question.

La revoilà encore sans que je sache d’où elle vient, la fameuse question d’Hamlet. Une idée chassant l’autre, je me dis que, pour les anglo-saxons, pas de confusion possible, avec « to be or not to be », le verbe être s’impose d’évidence, les évidences de la langue anglaise, bien sûr. Par contre, en français, l’homophonie du substantif et du verbe être, crée immédiatement l’embrouille, encore elle. Et comme les autres, je trébuche sur le quiproquo qui se la joue en vaudeville plein de méprises viriles pour réveiller chez le quidam le rire lourdingue « ridicule autant que méprisant » qu’en son temps dénonçait Mallarmé.

C’est alors que j’entends la voix d’André S. Labarthe qui m’interpelle : « cette errance, cher ami, dans les contrées de la métalinguistique, ça nous mène où ? »

J’aurai dû lui répondre par un trait d’esprit, mais rien ne m’est venu. Le bide ! Simplement un sourire béat.

Illico, moi, dans la bagnole, sur une route de montagne, je me revois à Massais, dans un couvent, où je prends mes quartiers d’été et quelques fois un petit quartier d’hiver quand ça chante Noël- il- est- né- le- divin marquis, pardon, enfant.

De toute façon, vous m’avez tous compris, les hôtes de l’hiver du cloître de Massais ne chantent pas ça, mais ils font tout comme, sans faire les petites mariollettes, en mangeant des huîtres de la Charente et du Saumon de chez Monsieur Faguet.

Comprenez-moi bien, Danielle et André, - ces paragraphes sont pour vous - je n’écris pas cela pour rendre hommage à l’amitié - un peu, quand même - mais surtout parce que dans les parages de Massais, à Massais, les oreilles attentives peuvent surprendre des voix anglaises qui vous en diront long, pour peu que vous les traduisiez librement, à votre guise, pas à la leur, bordel ! on est quand même chez nous, en France, même quand on met ensemble deux Sèvres pour faire un seul département. Quelle idée ! Comment ne pas tomber alors des nues, quand ces voix vous laissent percevoir, qu’au plan syntaxique, le substantif anglais pour définir un être est « being », un participe bien au présent qui donne the British locution human being, et que, nous, poverini francese, ne pouvons traduire que par être humain. Un verbe à l’infinitif, vous vous rendez compte ? Ah, cela nous mène loin, mon cher André, plus loin que Thouars, où quand même, faut le reconnaître, on trouve des chouquettes, une pâtisserie servie pas des jeunes filles, délicieuses de leurs personnes, ce qui ne gâte rien quand je te fais savoir, à toute fin utile, que la proposition de Prigogine « l’univers n’est pas, l’univers devient » implique aussitôt que l’idée n’a pas un fondement à partir d’un Substantif (qui incarne l’idée de Dieu, du Créateur de Tout, de la Vérité) mais qu’il naît (pas qu’il est né) d’une explosion interminable (un big bang) dans laquelle je, tu, vous, ils, nous sommes investis dans un devenir à faire avec les galaxies, l’univers, la terre, les contrées, la ville, le village où je, tu, il, vous, nous devenons...

(Tu vois, Danielle, je les oublie toujours, elles, pourtant je les aime tant) nous devenons, donc, avec elles, à chaque instant des étincelles de cette explosion qui n’en finit pas d’exploser dans les siècles des siècles. Mais oui, mais oui, avec elles Daniel nous écrivons l’Histoire de l’humanité, des civilisations, des cultures, de l’art, de la science, de l’économie, de la vie, quoi ! et de tout le reste qui s’inscrivent dans ce contexte, un ensemble que je modéliserai en ces termes : la vie est une explosion interminable. Interminable qui n’a rien à voir avec l’éternité qui est supposée ne pas avoir de fin. L’infini est interminable mais l’interminable n’est pas l’infini. Quiproquo, toujours qui laisse plutôt entendre que la question de l’éternité ne se pose plus dès lors que la question des limites cesse de se poser à chaque pas osé. Olé ! Olé ! CQFD

Ouf !

- Un petit arrêt buffet, le temps de sniffer quelques lignes de philosophie empruntées à la sagesse, à la sophia.

- C’est ça, parlons un peu de Sophie, ça calmera peut-être la bête. En attendant la livraison du prochain chapitre.

Fin de l’introduction

De la fonction métalinguistique dans
l’économie du récit

Le chapitre I s’intitulera

Le paradoxe de l’écran,
cinéma, ordinateur, téléviseur