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Numéro 22
La gangrène du chêne Cécile
par Eurénice Trinacria

Dans l’est de la France : des arbres malades de la forêt et des désordres climatiques, des espèces en mutation et une exploitation forestière peu scrupuleuse et sursitaire.

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Extrait

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Le chêne Cécile, celui qui se ramifie en grosses branches à une certaine hauteur, est celui qui souffre actuellement le plus, du moins c’est ce que m’a raconté le garde forestier local la dernière fois que je l’ai rencontré dans les bois. Ce chêne a besoin en moyenne de 300 litres d’eau par jour et d’un certain équilibre entre chaleur et humidité. C’est raté pour lui, il crève petit à petit depuis quelques années.

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Dans mon village, on dit que la nature se venge, puisque les arbres tombent malades avant qu’on puisse en faire du fric : changement climatique oblige. Les gardes forestiers sont alors contraints de faire intervenir d’énormes engins mécaniques pour procéder à des "coupes sanitaires", radicales et drastiques, là où il restera peu à exploiter des arbres atteints. Un arbre pourrait s’adapter aux changements ; d’ailleurs on prévoit que les chênes, les hêtres, les charmes de mon village croîtront bientôt plus au nord, puisque ici le climat devient trop clément. Cela fait drôle des Français qui émigrent. Pour les arbres, qui ont aujourd’hui entre cent et deux cents ans, le changement est trop rapide, trop brutal, et ces derniers tombent malades comme des mouches. Ils se meurent, tout simplement.

Mais ne vous inquiétez pas, pour le moment il y a toujours des semis qui poussent ; il y aura donc une prochaine génération de hêtres. Pourtant une chose est sûre : leur âge de maturité n’atteindra jamais plus les 150/180 ans. Celui-ci sera de 50 ans maximum, passé ce seuil on les coupera. On coupera petit, on renoncera désormais à faire des meubles, tant pis.

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