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Numéro 1
J’ai fait un trou dans ma chaussette
Par Fadil HAMMAS | Paru le février 1994
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Il y a près d’une semaine que cela s’est passé et ma chaussette ne s’en est pas encore remise.

La remise dans laquelle je me stocke tous les jours depuis quatre ans s’impose le long de la Seine...

..!.. sus aux périphrases, c’est l’Université Pierre et Marie CURIE (Paris VI).

C’est là que, fumiste et velléitaire, ma cervelle s’est laissée happer par les lois de Stockes [ voir note ] au point de se changer en yaourt. En yaourt, un peu comme ce qui reste de la cervelle des animaux que j’ai disséqués - avec une « conscience scientifique » sans cesse attisée, cela va de soi - lorsque dans mon ineffable mansuétude, je les décérébrais à moitié tremblant, à moitié omnipotent. Omnisciente, cette remise dans laquelle je sédimentais, ne pouvait en tout état de cause aucunement remettre en cause l’inexorable gélification de mes vagues pensées. Ces pensées que l’on m’avait appris à classer, à ordonner mais rarement à vivre. La vie, auparavant, c’était cogito ergo sum (je pense donc je suis), mais l’ergot est une butée, c’est pourquoi il apparaît évident que penser m’interdit d’être tel que je suis. Néanmoins, lorsque j’écris ce que je pense, je suis moi, mi-incarné, mi-désincarné. Je suis du monde ; « je pense donc je vomis ». Je suis le monde ; « je pense donc je dois agir ».

Ces pensées sont nées de mon moi non-incarné, pourtant tel un ongle qui le serait, elles, essentiellement dynamiques, emprisonnent mon corps effrayé par la douleur du mouvement.

Si tu n’as rien compris jusqu’ici,
si tu ne vois pas où je veux en venir,
si tu menaces de laisser tomber la lecture de ces quelques lignes,
si la prochaine phrase n’est pas prédigérée comme
tes cours, tes journaux, tes pensées,
ta vie, tes bonheurs comme
tes malheurs, ne compte pas sur moi,
relis, réfléchis et
prends une décision,
poursuis ou passe ton chemin.

Un bâtiment qui pourrait être un lycée, à la limite d’une frigorifiante atmosphère, c’est le lieu jovial et laborieux qui m’a ouvert les bras un dimanche.

L’on m’y offrit un thé ou un café afin de discuter en se réchauffant. Je refusais les deux pour me réchauffer uniquement en discutant, entouré d’une myriade d’elfes des deux sexes. La conversation atteint soudainement (dois-je dire à mon grand dam ou à mon grand plaisir ?) la température que tout cake doit subir au moins une fois dans sa vie et que les initiés reconnaîtront sous le pseudonyme de th7. Mais (dois-je dire heureusement ou malheureusement ?) l’heure était venue de monter. Non pas sur nos grands chevaux comme nous avions commencé de le faire, mais à l’étage supérieur, afin d’assister à ce qui m’avait été présenté avec une fierté (difficilement contenue et qui inondait par conséquent leurs visages, et débordait même, chez certains, de leurs bouches en une moitié de sourire), (j’ouvre cette seconde parenthèse pour préciser, au risque de me faire taper sur les doigts par les mordus de rhétorique, que le leurs de leurs visages se rapporte aux elfes. Gloire aux rhéteurs, mort aux rhéteurs (cf. les deux définitions du Larousse) !) et une humilité qui à elles seules m’avaient convaincu.

Vous vous ... tu, pardon, ... tu t’attends sûrement maintenant à ce que je te raconte ce que j’ai vu, entendu, senti, ressenti, même pensé ... Aussi ne vas pas t’imaginer que c’est juste pour te contrarier que je ne vais rien t’en dire pour t’exhorter (avec une habileté qui ne t’aura pas échappé ... non ?) à entreprendre la démarche de confronter ta vision de la musique, du, rythme, ainsi que l’idée que tu te fais de la danse et de l’expression corporelle à celle de Génération Chaos Musique.

Enfin, je tiens à préciser que c’est volontairement que ces quelques paragraphes se sont déroulés de manière apparemment anarchique. Génération Chaos Musique n’est pas en effet un de ces spectacles linéaires que l’on peut suivre en prenant des notes pour en faire un fade et infidèle compte-rendu. On aurait plutôt envie de se servir de son calepin pour participer à la musique, ou encore de le jeter en l’air pour aller danser avec l’ensemble du groupe. Ainsi tout article ne peut-il être qu’une plaisanterie (mon article ne serait-il qu’une plaisanterie !?)

N’insiste pas, je ne citerai aucun nom en guise de conclusion ; ni celui du créateur-metteur en scène, ni celui du chef des notes de musique et des rythmes, ni ceux des acteurs ou des musiciens-acteurs, pas même ceux du chœur ; tu risquerais de les mélanger. Et tu sais bien que si tu mélanges trois tubes de peinture de couleurs primaires, tu obtiendras, sinon du noir, rien de très beau. Il n’y a personne sur scène, sinon des longueurs d’onde (bleu, rouge, jaune) et des fréquences savamment mixées sur une scène où l’entropie taquine l’équilibre...

Et puis mélange tout ! Ce n’est pas grave, tu seras ébloui !